Nature et fonctions des ruines dans la peinture occidentale, XV-XXe s.
I. Les ruines dans l'espace du tableau
A) Des ruines, au premier plan comme à l'arrière-plan, à l'horizon, dans une vallée, sur un rocher, permettent de mettre en valeur le sujet : la ruine s'inscrit dans la profondeur de l'œuvre graphique.
Pierre-Etna (sic) Michallon, fils d'artiste et élève de Valenciennes, peignit en 1820-21 les ruines du grand théâtre de Taormine, avec l'Etna au loin (Il en existe plusieurs versions).
Quelques années plus tard, Thomas Cole reprit le sujet, dans la lumière du soleil levant. Emigré aux Etats-Unis, Cole revint peindre en Italie dans les années 1840 à la fin de sa vie. Depuis l'invention de la perspective au Quattrocento jusqu'aux paysagistes du XIXe siècle, la ruine permet de suggérer le lointain spatial ou temporel. Plaçons maintenant la ruine au loin :
Turner dessine ici les ruines de l'abbaye de Malmesbury à l'arrière-plan d'une modeste ferme (1794).
Toujours l'abbaye de Malmesbury, peinte ici en 1826 par Turner, au loin en arrière-plan du couple de paysans et de leur cheptel.
B) Les ruines qui figurent dans un tableau en marquent la composition.
La ruine est placée à gauche dans cette composition de Patel (Louvre, 1646-47)…
…ou placée à droite par le même Patel, vers 1650 (Collection BNP Paribas). Rien n'empêche de placer la ruine, au milieu de l'œuvre peinte, ce qui lui donne une force plus brutale dans le cas de cette création de Monsu Desiderio (c.1640) qui joue avec l'ombre et la lumière :
Selon Georg Simmel il y a une dialectique des ruines : l'homme érige l'édifice verticalement alors que la nature destructrice l'érode, l'aplatit, l'anéantit. Grâce à un violent contraste, ces deux axes figurent nettement au premier plan du tableau ci-dessus.
C) La ruine est aussi représentée comme sujet central et/ou unique, sans premier plan notable. Une ruine bien réelle : en quelque sorte une image documentaire.
Achille-Etna Michallon a ici strictement cadré le Colisée dans sa toile de 1810, tout en le sortant du paysage romain, sans insister sur les personnages presque masqués par l'ombre au premier plan.
En travaillant sur les ruines de Karnak en 1852, Hildebrand reprend bien les deux axes : verticalité de l'obélisque et des colonnes, horizontalité des blocs gisant au premier ou au second plan (aquarelle et gouache, musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg).
II. La ruine comme objet esthétique
La ruine représentée pour elle-même est magnifiée par sa représentation. Elle indique une forte présence du temps antique et pas du temps présent.
A) De la ruine d'atelier à la ruine peinte sur place : à l'antique, et composite, produite sans aller sur place ou à partir d'éléments toujours les mêmes, formant un répertoire. Avec la Renaissance le classicisme gréco-latin est le modèle. Colonnes, chapiteaux, obélisques, pyramides, arches… le tout assemblé en chaos "artistique". Les Italiens ne sont pas les derniers à s'inspirer des ruines.
Hieronymus Cock grave ici en 1552 une peinture de Maarten van Heemskerck. Collection de l'Université de Liège. La statue du Tibre (à droite) avait été exhumée en 1512. Tout ce matériel "archéologique" est amplement utilisé par les artistes du XVIIIe siècle.
Ici, Magnasco représente le Triomphe de Vénus (1725) dans un complexe décor de ruines antiques (Musée Getty, Los Angeles).
Charles-Louis Clérisseau est l'auteur de fantaisies architecturales (1765, collection Soane's, Londres) dont on retrouve d'autres versions à Saint-Pétersbourg (1765, L'Ermitage):
Le succès des reproductions des gravures de G.B. Piranèse (Venise 1720-Rome 1778) doit être souligné. Piranesi a parcouru Rome en tous sens et ses gravures témoignent aussi de Paestum. On pourrait multiplier les exemples. Ici, le "Campo Vaccino" comme on disait du forum impérial :
Les érudits relèvent les inscriptions. Tel un épigraphiste, Giuseppe Pannini vers 1730 copie la dédicace sur l'arc de triomphe de Titus qu'il représente ("Senatus populusque romanus…").
Les peintres du Nord descendent vers le Midi, vers le modèle antique, romain, et grec en Grande Grèce - donc Sicile - plus tard en Grèce proprement dite, libérée du joug turc. C'est la ruine peinte "sur le motif":
En 1553 Maarten van Heemskerck se représentait, sans doute le premier, en train de dessiner devant les ruines du Colisée, à côté de son autoportrait. Le séjour à Rome est un des moyens principaux du face-à-face avec les ruines pour ces artistes. Nicolas Poussin, François Nomé et Didier Barra, Pierre Patel sont descendus en Italie. Et bien sûr Le Lorrain.
B) La magnificence du Grand Siècle trouve son écho dans la grandeur de la ruine romaine. C'est la grandeur des créations humaines et de l'Antiquité gréco-romaine. C'est un reportage esthétisant pour magnifier la civilisation antique, et atteindre le sublime du paysage idéal.
Les constructions architecturales de Claude Gelée (Le Lorrain) ne sont pas abîmées ; elles constituent plus des vues urbaines et portuaires imaginaires que des ruines. Il n'empêche, le Lorrain peint aussi le bord de mer avec Apollon et la Sibylle de Cumes, en 1646-47 (L'Ermitage, Saint-Pétersbourg).
La peinture s'approche ainsi du paysage rêvé d'Arcadie où les bergers gardent leurs troupeaux au milieu d'un paysage bucolique.
Dans ce paysage italien, Pierre Patel place ainsi quelques vaches au premier plan devant ses ruines, en 1656 (Collection privée).
C) La ruine de fantaisie, composite, surtout après 1700.
C'est le capriccio. La vogue du "caprice architectural" du "paysage imaginaire", de la "fabrique", est illustrée par de nombreux artistes après 1700 : Albotto, Bellotto (le neveu de Canaletto), Leonardo Coccorante, Viviano Codazzi, Locatelli, Marco Ricci, Magnasco, Pannini, Servandoni, Clemente Spera, Giuseppe Zais… On ne peut les citer tous.
Une œuvre du vénitien Francesco Albotto. "A ruined Renaissance Gateway with a Statue of a Horse and a Sarcophagus on pedestals by a river" selon la galerie Andrew Blackman.
Leonardo Coccorante : Capriccio de ruines classiques sur la côte méditerranéenne (1720).
Le musée Bonnat de Bayonne conserve cette œuvre de J.J. Servandoni (1750 env.) : l'une des multiples représentations de pyramides à cette époque.
Cette autre œuvre de Servandoni (musée Calvet d'Avignon) date de 1770 ou environ. Même si le capriccio est une fantaisie constituée d'éléments croqués — ou non— sur place.
D) Le bonheur est dans les ruines !
Le XVIIIe : Grand Siècle de la Ruine. —Les dessins et gouaches de Servandoni (ci-dessus) visent un effet théâtral. Canaletto, Pannini, Marco Ricci, Locatelli, H. Robert, Lallemand , Francesco Guardi… multiplient les productions en relation avec l'essor du tourisme à Venise comme à Rome : "vedute" où la présence des ruines est une touche d'antique.
De retour d'Italie où il a peint un très grand nombre de ruines, Hubert Robert imagine cette vision de la grande galerie du Louvre en ruines (1796) — sans doute sous l'effet des perturbations révolutionnaires. Mais la plupart de ses ruines sont peu inquiétantes. C'est en somme comme la fausse ruine du jardin à l'anglaise. En revanche la ruine ajoute du réalisme social à la peinture des pauvres paysans, ou les bamboccianti (pauvres urbains au milieu des ruines - en Italie après le Caravage):
Jan Both, 1637. Ruines romaines et joueurs de cartes.
III. La métaphysique des ruines
Leur signification symbolique dépend de la conception que chaque époque se fait de l'espace-temps.
A) Les ruines témoignent de la vanité de toute entreprise, même des œuvres d'art. Rien n'échappe à l'impermanence. Elles traduisent un nouveau sens de l'Histoire, un processus qui n'est plus le temps immobile du moyen-âge. Elles signifient un état de déréliction : les ronces ou divers végétaux y poussent : c'est la décrépitude chère aux maniéristes comme à des peintres du XVIIIe siècle : Marco Ricci, Magnasco ou Canaletto.
Marco Ricci (1725)
Dans ce paysage de Canaletto "Ruines, Porta Portello à Padoue" (1750, Venise, Accademia) les plantes se sont attaquées aux ruines de droite et aussi celles de gauche, plus éloignées. Le premier grand paysage de ruines, accédant au fantastique, avait été dû en 1536 au frison Herman Posthumus qui assemble des éléments vus sur place. L'inscription sur le sarcophage évoque le temps destructeur de toutes choses : TEMPVS EDAX RE- / RVM TVQVE INVI- / DIOSA VETVSTAS / OIA DESTRVITIS. (Collection princière du Lichtenstein, Vaduz).
Deux siècles plus tard Diderot le répète : la ruine permet de méditer sur le cours du monde et la condition humaine. La ruine n'est plus du pittoresque mais un support de pensée. « La méditation de Diderot se veut ici plus prospective que rétrospective. La ruine fait moins rêver sur ce qui fut que sur ce qui sera (…) La rêverie sur les ruines était une mémoire, la voici devenue une anticipation. » (Roland Mortier, La poétique des ruines en France, 1974).
B) La ruine dans le tableau chrétien. Dès le début de la Renaissance, des scènes de martyres, des adorations des mages ou des bergers, sont propices à des représentations de ruines antiques.
Sur les ruines du vieux monde va s'édifier la civilisation chrétienne : le saint Sébastien de Mantegna (1480 Louvre) est martyrisé sur les ruines d'un édifice romain. Les pieds du martyr voisinent avec le pied d'une statue brisée, d'un empereur peut-être.
Albrecht Dürer réalisant en 1504 cette Adoration des Mages montre des bâtisses en ruines qui contrastent avec la promesse d'une ère nouvelle annoncée par Jésus. Les "adorations des bergers" et d'autres "adorations des mages" reprennent cette utilisation de ruines près de la crèche (cf. Botticelli).
Dans le paysage idéal de Nicolas Poussin montrant saint Jean à Patmos, figurent de même les ruines du monde antique sur lesquelles se construit le Nouveau Testament. (1640, Art Institute, Chicago).
Avec la ruine des abbayes, est-ce que l'on a voulu représenter le riomphe du protestantisme ? — François Nomé et Didier Barra ont quitté la France pour Rome vers 1600 puis Naples. Ils peignaient ensemble et se firent connaître sous le nom de Monsu Desiderio. "L'Explosion dans une église" est appelée par le Fitzwilliam Museum "King Asa of Judah destroying the idols", (c.1630); cette œuvre est attribuée à François Didier de Nomé (1593-1634…):
Sinon, on peut l'interpréter selon la thématique du châtiment divin. La ruine de l'édifice religieux permet d'adresser des avertissements moraux.
C) La ruine romantique. Si le paysage est une projection de l'âme pour les romantiques, alors la ruine est émouvante, elle préfigure la mort, souligne la petitesse des hommes, la finitude de l'homme. Les représentations de ruines d'abbayessont multiplées dans les années 1790-1830. On connaît surtout les ruines dessinées et peintes par Caspar David Friedrich (1774-1840); mais d'autres artistes romantiques en ont produit. Étudiée d'après nature, la ruine d'une abbaye sert alors une vision empreinte de mysticisme en même temps qu'elle suggère le retour du sentiment religieux.
Ruines d'un cloître, par C.D. Friedrich, 1823. La neige et les troncs d'arbre à contre-jour accentuent l'image macabre déjà proposée par les croix des tombes.
Klosterruine, 1823, C.D. Friedrich.
C.D. Friedrich : Ruines d'Eldena, près de Greifswald (Alte Nationalgalerie, Berlin, 1825).
Tintern Abbey, 1820, par J.M. William Turner.
Ruines de Melrose Abbey, 1822, par Turner.
Ruines d'Oybin, 1823, par Karl Blechen.
La ruine va jusqu'à donner l'impression d'écrasement dans cette interprétation de Karl Blechen (Ruine d'une église gothique, 1826).
Avec la redécouverte du Moyen-Âge qui se fait à l'époque romantique, il n'est pas surprenant que le monument médiéval soit figuré en ruines, tel le burg rhénan. Ici une œuvre de Victor Hugo.
D) La fin des civilisations. La préfiguration de la fin du monde ou d'un monde. La ruine illustre le triomphe du Temps. Le XVIIIe finissant — bien qu'on lui attribue l'invention du bonheur et du progrès — véhicule aussi le thème de la fin : celle des civilisations antiques, liée aux découvertes archéologiques qui ont lieu à cette époque. Les fouilles archéologiques s'activent en Italie après 1770. Piranèse dessine les temples de Paestum, Michallon peint des ruines de Pompéi en 1810, Turner peint le Temple de Junon à Agrigente, vers 1830... Dans une célèbre composition de 1836, Thomas Cole a aussi traité le thème de la chute de Rome (The Course of Empire : Destruction. New York Historical Society).
La ruine c'est la dégradation des choses que produisent les hommes et elle doit donner le sentiment du temps qui passe. À la limite la ruine n'est qu'un médiocre assemblage de pierres et de cailloux avec cette toile de Jean Guillaumin , ci-dessus (Ruines dans le brouillard à Crozant, Bridgeman, 1894). En somme une préfiguration des ruines sans précédent que la Grande Guerre est sur le point d'engendrer. La disparition tant de l'homme que des œuvres d'art qu'il crée pour défier le temps.
Conclusion - De la ruine au recyclage (XX - XXI°)
On assiste au déclin de la ruine peinte passée la Belle Époque. Avec la guerre mondiale les ruines n'intéressent pratiquement plus que des peintres mineurs. On prendra l'exemple de Joseph Bouchor qui a peint en 1917 les ruines de la cathédrale de Reims. (Musée de Blérancourt).
Désormais c'est la photographie qui prend en charge la représentation de la ruine, particulièrement dans les magazines comme L'Illustration, puis avec les cartes postales dès années vingt. Bientôt le cinéma expose la ruine, le cataclysme, la fin du monde, en attendant les vidéos du 11 septembre 2001 et les films hollywoodiens de fin du monde. De son côté, par ses tableaux, ses sculptures et ses installations, Anselm Kiefer multiplie des signes de guerre, plus que des ruines. Pour Monumenta 2007, il a présenté "la tour écroulée" :
L'actualité de la ruine c'est aussi le recyclage. Arman sait détruire pour créer. On assiste finalement à un retour aux ruines "fabriquées" à partir d'objets déconstruits ou récupérés (installations contemporaines). Le temps n'a plus prise sur les objets : ils envahissent l'espace.
• Les peintures de ruines se font donc paradoxalement rares au XXe siècle :
Voici une œuvre de l'américain John Armstrong, Phoenix, (Leeds Museums, 1938). Bien entendu le phénix renaît de ses cendres...
Le thème de la ruine est à la mode en ce début de XXI° siècle, cf. le succès de l'exposition Hubert Robert au Louvre, en 2016... sans compter que la destruction, stade final de la déstructuration, est au goût du jour : Palmyre en ruines marque les esprits tandis que le cinéma filme la fin du monde.
À consulter :
- Luigi Ficacci : Piranesi. The complete etchings. Taschen, 2000, 798 pages.
- Michel Makarius : Ruines. Représentations dans l'art de la Renaissance à nos jours. Champs, 2011 (Flammarion, 2004).
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Objet de fascination autant que d’inquiétude, les ruines ne sont pas absentes de l’histoire de l’art avant la période baroque. Cependant le Moyen-âge ne leur accorde en général qu’une valeur symbolique, à portée édifiante voire moralisatrice. La Renaissance, trop axée sur la redécouverte et la glorification du monde antique, les relègue souvent à l’arrière-plan des œuvres. Le XVIIe siècle marque un premier basculement avec la production inattendue du très mystérieux Monsu Desiderio.
MONSU DESIDERIO
Engloutissement de l’Atlantide, villes incendiées aux allures de gigantesques décors de théâtre, explosion dans une église prise sur le vif : les artistes qui se cachent sous le pseudonyme de « Monsieur Didier » (vraisemblablement François De Nomé et Didier Barra, deux lorrains installés à Naples dans les années 1610) proposent, sous couvert d’art fantastique, un étrange univers de cités crépusculaires en attente d’on ne sait quelle apocalypse. Un corpus sans équivalent pour leur époque, qui leur vaudra une reconnaissance comme précurseurs du surréalisme par André Breton lui-même.
Cependant, nous ne sommes pas encore ici dans une véritable exploitation artistique des ruines, réelles ou imaginaires, mais plutôt dans une représentation de la catastrophe en train de s’accomplir. La ruine chez Monsu Desiderio est un work in progress, en cours d’accomplissement, à l’image de leur tour de Babel, monstre de pierre dont on devine les premières fêlures sous un ciel enténébré.
LES PATELS
Véritables peintres de ruines au sens propre du terme, Pierre Patel (1605 ?-1675) et surtout son fils Pierre-Antoine (1648-1707) offrent, toujours au XVIIe siècle, une vision nettement plus souriante et moins onirique des ruines. Mais comme pour beaucoup d’autres à la même époque ces deux artistes ne conçoivent pas les vestiges monumentaux comme un sujet en soi mais comme un simple élément à portée décorative, prétexte a exposition de scènes champêtres.
Il faudra attendre le milieu des années 1700 pour que le potentiel pictural des ruines soit réellement pris en compte pour lui-même par les peintres. Le XVIIIe siècle sera en effet le siècle des représentations de paysages parfois envahis de vestiges, les vedute, ancêtres de la carte postale, et les capricci où les monuments du passé sont ouvertement réinventés, voire complètement fantasmés, selon le caprice de l’auteur. La redécouverte des sites d’Herculanum et de Pompéi à partir de 1709, et surtout leur exploitation systématique après 1748 sous la conduite de Roque Joaquin De Alcubierre n’est évidemment pas étrangère à cet engouement.
PANINI
Giovanni Paolo Panini (1691-1765) sera un important représentant de ce courant où la recherche du pittoresque empiète souvent sur le souci réaliste, les monuments, même réels, étant parfois rassemblés arbitrairement au même endroit dans une logique de musée imaginaire. Le but final de ces œuvres était aussi, ne l’oublions pas, d’offrir au spectateur un souvenir du Grand tour que tout européen de bonne famille se devait d’effectuer dans la péninsule italienne, comme dans ce veduto :
PIRANESE
Mais 1748 est aussi l’année où Piranese (1720-1778) publie son premier recueil de vues de la Rome antique. Huit ans plus tard, il édite le premier des quatre tomes de son Antichita Romane. Malgré un goût encore très assumé pour l’imaginaire, l’auteur s’oriente déjà dans ces eaux-fortes vers une représentation plus soucieuse de vérité archéologique. Les monuments, en dépit de leur délabrement, deviennent ici les acteurs principaux d’une mise en scène qui ne recule devant aucun effet de perspective ou de lumière pour les mettre en valeur d’une manière parfois un peu écrasante, voire oppressive, pour les figurants humains égarés dans l’espace de la gravure. Piranese n’est pas pour rien l’auteur des « Prisons »…
HUBERT ROBERT
Surnommé « Robert des ruines », le français Hubert Robert, qui a fréquenté l’atelier de Piranese et rencontré Panini lors de son séjour italien, sera sans doute, avec son compatriote Pierre-Antoine Demachy (1723-1807) le dernier grand spécialiste du paysage de ruines avant la tourmente de la période révolutionnaire. Après eux, le regard sur les vestiges du passé change de nature et devient, par exemple sous le pinceau d’un Caspar David Friedrich, une expression du mal être romantique.
Yannick Fereng
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