https://museeduluxembourg.fr/sites/luxembourg/files/dossier_pedagogique_RUBENS.pdf
L’exposition du Musée du Luxembourg permet de comprendre l’intérêt des portraits princiers de Rubens à travers plus d’une centaine d’œuvres, peinture, gravures, dessins ou encore tapisseries de très grands formats (qui témoignent de l’intérêt porté à la carrière de Rubens au xixe siècle). C’est l’occasion, dans le cadre du Parcours d’Éducation Artistique et Culturel, d’aborder deux thématiques importantes : l’art du portrait et la reproduction des œuvres d’art. D’autre part, l’exposition traite de sujets relatifs à l’histoire et la géographie et notamment : les grandes cours d’Europe au xviie siècle et la diplomatie.
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https://www.wikiart.org/fr/pierre-paul-rubens
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Iconologie de "L'Adoration des Rois Mages" de Rubens
L’adoration des mages. Pierre Paul Rubens, 1624. Huile sur panneau de bois, 447 x 336 cm. Musée royal des Beaux-Arts, Anvers (Wikipedia).
L’adoration des mages selon Rubens
SYLVAIN CAMPEAU | 23 DÉCEMBRE 2019
L’adoration des mages est le tableau que Pierre-Paul Rubens a le plus représenté [1]. Celui retenu ici, peint en 1624, met en scène l’hommage des visiteurs venus d’Orient au roi qui vient de naître et évoque leur long voyage en montrant une partie de leur cortège et de leurs montures.
Le premier des mages, vêtu de blanc, au centre inférieur du tableau, est agenouillé aux pieds de l’enfant et de sa mère. Il tient un encensoir d’allure liturgique et son regard est porté sur l’enfant. Derrière lui, le plus âgé est vêtu d’un manteau rouge et apporte deux vases en or. Le troisième est au centre du tableau et porte un turban et un manteau vert. C’est le mage qui, traditionnellement, apporte la myrrhe. Les visiteurs sont accompagnés de serviteurs et de soldats. Joseph est en retrait et dans la pénombre à droite de la scène. Marie est assise et surveille Jésus posé sur ses genoux ; la mère et l’enfant sont en pleine lumière. Un bœuf, au bas du tableau, semble indiquer que nous sommes dans une étable. Certains voient dans les éléments architecturaux d’arrière-plan les ruines du palais de David.
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Lorsque l’on pense à l’Art de Rubens, l’on voit apparaître une multitude de femmes alanguies et de déesse callipyges. Peintre de la chair et de ses corpulentes tentations, Pierre Paul Rubens n’en demeure pas moins l’un des artistes les plus convoités des souverains de son temps. Qu’il s’agisse des Ducs de Mantoue, des Princes d’Espagne ou de la Cour de France, tous doivent au pinceau de cet Anversois le privilège d’avoir pu traverser les siècles. En retour, Rubens leur est, de toute évidence, redevable de sa fortune et sa notoriété. C’est précisément autour de cet échange tactique et culturel que s’articule l’exposition « princière » du Musée du Luxembourg.
L’exposition s’ouvre sur un portrait de Marie de Médicis entourée de ses dames d’honneur. Face à elle, Rubens est élégamment représenté, pinceau à la main en train d’esquisser la régente. La relation qui prévaut entre cet artiste et sa noble commanditaire, donne le ton de cette manifestation : une peinture d’apparat où le peintre glorifie avec ostentation les mécènes qui le sollicitent.
A travers une centaines de tableaux, le spectateur est donc invité à déambuler au sein des somptueuses cours européennes du XVIIe siècle. Qu’il s’agisse de la Cour des Gonzague, de celle des Flandres dont Rubens est originaire, de celle d’Espagne qu’il rejoint en 1628 ou de la Cour de France régentée par Marie de Médicis, ce peintre migrateur nous donne l’impression d’avoir côtoyé toutes les têtes couronnées de son temps.
Une telle succession de portraits historiques pourrait donner le tournis ou lasser le visiteur par sa monotonie thématique mais il n’en est rien : au fil des salles, l’on se prend, en effet, au jeu des grandes lignées. D’un tableau à l’autre, l’on analyse les liens généalogiques de ces familles de sang bleu et l’on s’amuse de voir à quel point elles se croisent et se chevauchent par-delà les siècles et les pays. Parallèlement à cette leçon d’histoire illustrée, l’on se laisse bien sûr charmer par la richesse picturale des œuvres.
Pour être séduit, il ne faut surtout pas traverser cette exposition au pas de course: prenez le temps en arpentant les salles de chercher le détail. Si vous laissez vos yeux se promener lentement sur chaque toile, vous serez happés par la beauté nacrée d’une perle, l’exubérance d’une fraise ou l’onctuosité d’une tenture grenat. N’hésitez pas à mettre de côté l’aspect pompeux et hiératique propre aux portraits officiels et tentez de capter la touche fluctuante de Rubens : préalablement sage et linéaire, la « Maniera » de ce génie se meut en effet au fil des tableaux. D’un souverain à l’autre, son trait se libère, gagne en vivacité, ses dentelles deviennent vaporeuses, ses personnages délaissent leur rigide posture, quand aux reflets de lumière, ils se transforment progressivement en des éclaboussures blanches quasi-impressionnistes !
Certes, l’exposition nous ramène sans cesse à la figure emblématique de Marie de Médicis qui fut certainement l’un des commanditaires les plus exigeants de Rubens. A travers le cycle de 24 tableaux devant décorer son Palais du Luxembourg, la Reine de France est docilement magnifiée par l’artiste: tour à tour déesses des Arts, siégeant parmi les Dieux ou couronnée en manteau fleurdelisé face à un parterre de cardinaux assujettis, Marie de Médicis utilise à dessein ces allégories excessivement théâtrales afin d’asseoir sa légitimité.
Une telle emphase, avouons-le, peut prêter à sourire… mais l’on ne doit pas contrarier les puissants! Rubens, semble-t’il, l’avait fort bien compris : aussi érudit que conciliant, ce peintre diplomate a su façonner l’image des grands de son temps pour en tirer lui-même une bien belle gloire.
L’exposition Rubens? Une somptueuse parenthèse picturale qui va vous faire réviser votre Histoire !
Rubens : Portraits Princiers
Musée du Luxembourg
19 rue de Vaugirard – Paris 6e
Informations : 01 40 13 62 00
Du 4 octobre au 14 janvier 2018
Du lundi au dimanche de 10h30 à 19h
Nocturne tous les vendredis jusqu’à 22h
Nocturnes supplémentaires jusqu’à 22h les lundis du 13 novembre au 18 décembre 2017
http://museeduluxembourg.fr/expositions/rubens-portraits-princiers
Les textes
Le récit de l’adoration des mages vient de l’Évangile selon Matthieu (2,1-12). L’évangéliste Luc raconte plutôt une adoration des bergers (Luc 2,8-20). Dans le récit du premier évangile, des mages venus d’Orient se sont déplacés en suivant une étoile pour rendre hommage au roi venant de naître, en passant par le palais d’Hérode à Jérusalem. L’étoile réapparaît et les conduit ensuite dans une maison de Bethléem. Ils offrent à l’enfant des cadeaux dignes d’un roi – or, myrrhe et encens – et s’en retournent par un autre chemin pour éviter de croiser Hérode. C’est surtout le verset 11 de ce récit qui a inspiré l’artiste.
Ils entrèrent dans la maison et ils virent l’enfant avec sa mère, Marie. Ils se prosternèrent pour lui rendre hommage. Ils ouvrirent leurs coffrets et présentèrent à l’enfant les cadeaux : de l’or, de l’encens et de la myrrhe.
Mais un élément du tableau est étranger au récit : la présence du bœuf qui provient de l’Évangile de l’Enfance du pseudo-Matthieu 14. Ce texte apocryphe du VIIe siècle ajoutent certains détails aux récits de l’enfance dont la présence de l’âne et du bœuf qu’on retrouve encore dans nos crèches de Noël. Cette présence animale est expliquée par l’auteur de l’apocryphe en se référant à deux textes prophétiques. La deuxième référence (Habacuc 3,2 selon la Septante) est la plus pertinente : « J’ai considéré tes œuvres, et je me suis extasié. Entre deux animaux tu te manifestes ; quand les années seront proches, on te connaîtra ; quand les temps seront venus, tu apparaîtras ; quand mon âme est troublée de ta colère, souviens-toi de ta miséricorde. » C’est le thème de l’adoration qui a sans doute incité le pseudo-Matthieu à intégrer ces animaux dans son récit car il écrit : « Le bœuf et l’âne, fléchissant les genoux, adorèrent [l’enfant] ».
L’interprétation picturale
L’adoration des mages et l’un des thèmes les plus anciens et les plus représentés du Nouveau Testament. On le retrouve, par exemple, dans la catacombe de Priscille à Rome (deuxième moitié du IIIe siècle), dans d’autres catacombes et sur des sarcophages anciens de la même ville. Le peintre Rubens reprend ici cette tradition à la demande de l’abbé Matthias Yrsselius pour orner le maître-autel de l’abbaye Saint-Michel d’Anvers.
Jésus et Marie ne sont pas au centre du tableau mais tous les regards sont tournés vers eux et ils sont en pleine lumière. Malgré sa proximité, Joseph est dans l’ombre ; il s’agit ici d’un contraste lumineux qui caractérise bien l’art baroque. Ce détail est conforme au texte où Joseph n’est pas mentionné et n’a aucun rôle contrairement aux récits qui encadrent l’adoration des mages dans l’évangile selon Matthieu : Joseph et la visite d’un ange (1,18-25) et la fuite en Égypte (2,13-15). Joseph est représenté sous les traits d’un vielle homme barbu, un héritage d’un autre évangile apocryphe : le Protévangile de Jacques.
Comme le veut la tradition, Marie est vêtue d’une robe rouge, d’un manteau bleu et d’un voile. Jésus ne ressemble pas à un nouveau-né mais à un poupon curieux, intéressé par la présence des visiteurs. Il est nu, couché sur son lange et retenu par les mains de sa mère. Il semble en mouvement comme plusieurs personnages du tableau.
Le texte de Matthieu ne précise pas le nombre des mages et ne dit pas qu’ils étaient rois. Mais la tradition occidentale a rapidement fixé leur nombre à trois et la relecture de certains textes de l’Ancien Testament (Isaïe 60,3 et Psaume 72 par exemple) a permis de leur attribuer le titre royal. À partir du XIIe siècle, on a représenté les mages en évoquant les trois âges de la vie, comme on peut le voir dans le tableau. L’origine des mages s’est précisée avec le temps et à partir du XVe siècle, on en faisait les représentants des trois continents connus à cette époque : Asie, Afrique et Europe.
Dans le tableau de Rubens, les mages ne portent pas de couronne mais sont vêtus de vêtements somptueux dont les couleurs respectent la tradition : le blanc, le rouge et le vert. Leurs vêtements sont un reflet des modes vestimentaires de l’époque du peintre et servent à les distinguer des autres personnages. Comme on peut le constater en comparant le tableau et la représentation de la catacombe de Priscille (voir l’encadré ci-contre), la représentation des mages a évolué avec le temps. Alors que seule la couleur permettait de les distinguer à l’origine, ils ont une personnalité mieux définie dans le tableau du maître. Depuis le Xe siècle, ils ont d’ailleurs chacun un nom – Gaspard, Melchior et Balthazar – dérivés d’un troisième apocryphe : l’Évangile arménien de l’Enfance. Gaspard est vêtu de blanc et apporte l’encens ; c’est un homme d’âge mûr qui représente le continent asiatique. Le vieillard européen vêtu de rouge derrière lui est Melchior et offre l’or. Au centre du tableau, on veut voir le plus jeune, Balthazar, qui apporte la myrrhe et dont l’expression est la plus étonnante.
La présence du bœuf dans le tableau est surprenante car elle contrevient à une recommandation du Concile de Trente (1563) qui en avait interdit la représentation (ainsi que celle de l’âne) dans les scènes évoquant les récits de l’enfance. L’interdiction a été respectée dans la majeure partie des cas à la fin du XVIe siècle et au siècle suivant mais l’âne et le bœuf sont réapparus ensuite. Certains critiques expliquent ainsi la présence de l’animal dans le tableau : le bœuf est un symbole de la foi, une grâce qui est offerte non seulement au peuple juif mais à toutes les nations. Pour conclure, une dernière observation. Le bœuf ne regarde pas la scène mais semble plutôt fixer celui qui observe le tableau : on peut y voir une interpellation pour se joindre au mouvement d’adoration des autres personnages.
Diplômé en études bibliques (Université de Montréal), Sylvain Campeau est responsable de la rédaction.
[1] Michael Jaffé (Rubens : Catalogo Completo, 1989) dénombre 15 représentations du récit de l’adoration des mages. L’encyclopédie libre Wikipédia présente les cinq plus célèbres.
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"Trois Mages" de Rubens, réunis à Washington après un siècle de séparation
Après leur dispersion aux enchères à Paris et plus d'un siècle de séparation, trois portraits des Trois Mages signés du peintre flamand Rubens sont exceptionnellement réunis, pour trois mois, à la National Gallery of Art de Washington.
Les portraits de Gaspard, Melchior et Balthazar, les trois rois mages venus selon la tradition chrétienne apporter des offrandes à l'enfant Jésus, avaient été peints par Rubens (1577-1640) pour un de ses amis d'enfance, Balthasar Moretus l'Aîné, patron de Plantin Press, la plus grosse imprimerie d'Europe aux XVIe et XVIIe siècles.
Les trois tableaux, peints en 1618, étaient restés dans la famille jusqu'en 1881, date de leur dispersion après des enchères à l'Hôtel Drouot à Paris.
La National Gallery de Washington possède le Melchior qui ne peut voyager, en vertu des conditions posées par son donateur, et reçoit ainsi du 22 mars au 5 juillet Balthazar, détenu par le musée Plantin-Moretus d'Anvers en Belgique et Gaspard, accroché d'ordinaire au Musée des Beaux-Arts de Ponce, à Porto-Rico, pour une "occasion unique de les revoir ensemble", selon le musée.
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L'Adoration des mages (Rubens)
L'Adoration des mages est l'épisode biblique que Pierre-Paul Rubens a le plus représenté. Hans Devisscher en a compté dix versions1 ; Michael Jaffé en dénombre quinze2. Les plus célèbres sont :
Image | Titre | Dimensions | date de création | Matériau | Référence | Collection |
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L'Adoration des mages | 355 × 493 cm | 1609, retouché en 1628 - 1629 | Huile sur toile | Musée du Prado, Madrid | ||
L'Adoration des mages | 1616-1617 | King's College Chapel, Cambridge | ||||
L'Adoration des mages | 251 × 328 cm | 1617-1618 | Huile sur toile | Musée des beaux-arts de Lyon | ||
L'Adoration des Mages | 235 × 277 cm | vers 1620 | Huile sur toile | Musée de l'Ermitage, Saint-Petersbourg | ||
L'Adoration des mages (esquisse pour Anvers) | 63 × 48 cm | 1624 | huile sur chêne | Wallace Collection, Londres | ||
L'Adoration des mages | 99 × 139 cm | 1624 | huile sur toile | Musée royal des Beaux-Arts d'Anvers | ||
L'Adoration des mages | 283 × 219 cm | 1626-1629 | huile sur toile | Musée du Louvre, Paris |
Notes et références
- Hans Devisscher, Peter Paul Rubens: Aanbidding der Koningen, 1992.
- Michael Jaffé, Rubens: Catalogo completo, 1989. w.fr.
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